Emmanuelle Roques est une amie Bordelaise avec qui je partageais l’espace de coworking du Node à Bordeaux. Il y a quelques années, elle s’est spécialisée dans la méditation et vient justement de faire un voyage à New York.
Elle propose ici de nous partager son expérience enrichissante, elle qui a crée en 2015 Mindfulness Social Club ici à Bordeaux.
Je vous laisse entre les écrits d’Emmanuelle. Cela vous donnera peut-être aussi envie peut-être de vivre votre propre expérience de méditation à New York.
Alex les bons plans
Introduction à “Meditation in The City”
Si vous visitez New York, que vous pratiquez déjà la méditation ou pas, ça pourrait être l’occasion d’explorer cette ville et rencontrer ses habitants d’une façon inhabituelle et intime. C’est ce que j’ai fait récemment.
Je suis instructrice de méditation de pleine conscience. Je me rendais au formidable Institut Omega à Rhinebeck à 1h30 au nord de New York pour une semaine de retraite dans le cadre de ma formation pour enseigner le programme MBSR (Réduction du stress par la méditation de pleine conscience).
En chemin, j’ai passé 48 heures dans « la ville qui ne dort jamais », mais qui certainement médite …
J’y ai trouvé toutes les possibilités de pratiquer dont on peut rêver, ainsi que d’excellents centres et professeurs.
Peut-être savez-vous que lorsque l’on parle de méditation, c’est comme dire « sports », il y a toutes sortes de pratiques différentes. Cependant les raisons de pratique ne sont pas les mêmes, les environnement culturels sont différents.
Même si tous ont en commun une recherche de quelque chose de plus profond que leur course quotidienne effrénée.
On peut faire une différence entre deux catégories de méditations, même si la deuxième trouve ses racines dans la première : les pratiques basées sur l’une des différentes traditions contemplatives. Et la deuxième, la mindfulness, approche développée dans le monde médical et validée par la recherche scientifique pour l’amélioration de la qualité de vie, notamment par son aspect bénéfique sur le stress.
La région de New York (et ses États proches) est une partie des USA où de nombreux enseignants occidentaux sont venus s’installer après leur exploration des traditions orientales dans les années 70. De nouvelles générations d’enseignants sont nées nourries par ses pionniers.
Du côté de l’approche mindfulness, à 3 heures de route, au Center for Mindfulness in Medicine, Healthcare and Society fondé par Jon Kabat-ZInn, l’équipe de Saki Santorelli et Florence Méléo-Meyer forme des instructeurs du programme MBSR depuis des décennies. Je vous en dirai un peu plus tout à l’heure.
Mon premier arrêt à Mindful Harlem
Par où allais-je commencer dans cet immense panorama ? J’étais comme un enfant dans un magasin de bonbons. Je savais que je ne pourrai tout voir n’ayant que peu de temps, juste une journée en fait … alors qu’il faudrait des années pour explorer toutes les possibilités rassemblées sur les quelques kilomètres carrés de cette ville !
J’ai décidé d’aller explorer ce que je connais bien et ce pour quoi je suis formée : l’environnement mindfulness et le programme MBSR. Ce protocole médical sur 8 semaines (Réduction du stress par la méditation de pleine conscience) a été créé en 1979, il sert de référence fiable à de nombreuses approches et programmes. Les instructeurs sont formés sur les principes de cette méthode précise et validée par les résultats de la recherche scientifique.
Ce programme est aujourd’hui proposé dans des centaines de centres de soins partout dans le monde. Mais aussi, grâce à ses adaptations, dans des organisations publiques ou privées, dans l’éducation, même en prison…
En cherchant sur internet, j’ai trouvé le site collaboratif des instructeurs MBSR locaux, le Mindfulness Meditation New York Collaborative. Et j’ai suivi mon intuition pour trouver une session qui corresponde à mon emploi du temps.
C’est ainsi que j’ai connu la session « Drop in and Sit » du samedi matin (9h à 11h) proposée par Mindful Harlem. Comme son nom l’indique, il se trouve à Harlem sur la 119ème rue, coté ouest.
Prendre le train express D est une façon rapide et facile de s’y rendre. Mais il était hors service ce matin là, pour une raison obscure, mais « normale » pour New York… Il a fallu que je courre jusqu’à Penn Station pour le train C, ce qui m’a donnée une occasion de pratiquer le « lâcher prise de toutes volontés », même le basique « être à l’heure » !
Mindful Harlem est un centre de méditation orienté vers la création de lien social dans la communauté. Le programme MBSR y est proposé, ainsi que deux fois par semaine, des sessions sans rdv et en participation consciente. Elles sont ouvertes à tous, pratiquants réguliers, débutants et même aux touristes comme moi.
Le centre a aussi un programme d’ateliers de différentes approches : Feldenkrais, Yoga, Musicothérapie et plus encore.
Le lieu a été fondé par Adrian Bueno and Jayne Gumpel, instructeurs MBSR, rejoints par d’autres enseignants. Archimedes Bibiano est l’un d’eux et c’est lui qui m’a accueillie quand je suis arrivée, heureuse d’être finalement à l’heure … et en sueur !
La salle de méditation de Mindful Harlem est au rez de chaussé. C’est un grand et bel espace, au sol couvert de parquet en bois avec tout ce qu’il faut pour les activités : chaises, coussins, tapis de yoga, une bibliothèque de prêt, une petite cuisine, des toilettes. Il y a même une petite boutique avec de jolis t-shirts « Mindful Harlem ».
Une dame était déjà là et d’autres personnes nous ont rapidement rejoint. C’étaient surtout des voisins, car, la pluie matinale et l’absence du train D avaient découragé des personnes venant de plus loin.
Donc il y avait quelques chaises et coussins vides…
Et c’est par là que Archimedes Bibiano commença la session : « En regardant ces chaises vides, je vois beaucoup de possibilités pour l’exploration … ». C’était une puissante introduction pour les deux généreuses heures qu’il nous a offert. Pratique de l’attention, méditation guidée, puis silencieuse et des exercices de mouvements en conscience avec des séquences d’un lent yoga adapté, en respect de participants ayant des capacités de déplacement limitées.
J’ai beaucoup apprécié cette façon d’entrer dans le mouvement. Cela m’a aidée à lâcher ma volonté souvent inconsciente de faire de « l’exercice » pendant ce type de séquence, alors qu’il s’agit de s’entrainer à l’attention.
Durant cette pratique, j’ai senti combien il est bon de sentir dans le corps qu’il sera toujours possible de le percevoir vivant, même avec des capacités limitées. Vieillir, être malade est inévitable. En pratiquant avec des limites que je n’ai pas actuellement, m’a permis de réaliser que ces limitations dont je peux avoir peur, ne sont pas en fait des limites.
J’ai été profondément touchée par la façon dont Archimedes a partagé sa guidance avec le groupe, avec bienveillance et beaucoup de générosité. Il y avait de la poésie dans l’air… et il nous a effectivement offert de la poésie en lisant un beau poème écrit par lui. Il exprime comment en nous connectant avec nous-même, nous changeons notre perception du monde, et comment prêter attention, nous permet d’aimer.
Ce texte s’appelle « Pay attention to love » soit « Porter attention à l’amour » ou « Etre attentif pour aimer » selon l’angle que l’on adopte.
Il y a eu ensuite un temps de partage avec le groupe, afin que chacun puisse verbaliser son expérience, pour ceux qui le souhaitaient. Cela m’a touché de pouvoir entrer dans l’univers des autres, leurs sentiments et leurs pensées. Des étrangers quelques instants plus tôt, finalement frères et sœurs humains pour moi qui vit si loin de leur culture, leur environnement et leur quotidien.
La méditation est une façon formidable de faire de vraies rencontres et de partager avec eux. La pratique en groupe nous permet de partager avec les autres une expérience profonde.
Après la session et après avoir pu discuter avec Archimedes de son parcours et des activités du centre, j’ai passé un moment agréable à boire du thé et à parler avec l’une des dames du groupe. Sa fille est propriétaire du restaurant réputé Vinateria, juste à côté.
Nous avons parlé de nos vies, de nos familles et de nos projets. Je me suis sentie comme chez moi, comme une voisine. C’est un sentiment agréable quand on voyage seule et que l’on est loin de son « home sweet home ».
J’aurai bien passé la journée là à papoter, mais l’exploration de New York m’appelait ! Il faisait beau avec un doux vent tiède, un jour d’automne idéal pour se balader. Et j’avais un autre rendez-vous à Greenwich Village, dixit « The Village », 110 rues plus bas.
Balade entre deux sessions de méditation
J’adore faire du vélo et je n’ai jamais pu en faire à NYC. C’était compliqué avant et cher d’en louer un et dangereux de circuler. Mais maintenant il y a Citi bike !
J’ai marché jusque au coté nord de Central Park à quelques blocs et pris un vélo à la station en utilisant ma carte de crédit. Pour $10, je me suis offert la balade dont je rêvais depuis plusieurs décennies.
Les couleurs du parc à cette saison sont extraordinaires, c’était génial de voir les familles et des amis pique-niquer, les enfants courir, les amoureux s’embrasser, les bikers faire la course (beaucoup de matos haut de gamme !).
Peut-être la méditation m’a permis d’avoir une expérience encore meilleure, les sens ouverts, un sentiment de calme intérieur et de joie de vivre. Même quand il m’a fallu pédaler plus fort dans les côtes !
J’aurai voulu que cette balade ne s’arrête jamais et arrivée à la sortie sud ouest du parc à Colombus Circle, en cherchant une station pour reposer mon « destrier », j’ai réalisé qu’il y a désormais des pistes cyclables tout le long de Broadway, peintes en vert et protégés par une bordure par endroits, NYC est cyclable maintenant.
En passant par Times Square, Herald Square, Union Square, je me suis sentie en sécurité la plupart du temps. C’est amusant, la ville n’était qu’un festival. Il y avaitde la musique partout, des stands pour manger toutes sortes de plats locaux ou exotiques, des marchés fermiers, de quoi se divertir partout. Tout cela jusqu’en bas de la huitième rue pour la session suivante de mon exploration “Méditation in The City”. Et par chance, il y avait une station de vélo juste au coin de la rue.
Deuxième arrêt à MNDFL
J’avais vraiment besoin de boire un truc bien frais après cette course à travers la ville qui ne m’a pris qu’une demi heure et m’a semblé un rêve sans fin !
Après une petite marche autour de Washington Square Park, goutant l’atmosphère particulière de ce quartier habité par des étudiants New York University (NYU). Cette institution gère de nombreux bâtiments au sein de ces quelques blocs, créant une ambiance de campus dans cette partie de la ville, en plein cœur de Manhattan.
Allez maintenant en route pour MNDFL. WTF ça veut dire ?
Ajoutez un « I » et un « U » et vous aurez la réponse : MINDFUL.
Ça ressemble aux lignes de métro, QRNCD … C’est une façon de raccourcir les mots, tout en les gardant lisibles pour les esprits rapides des New-Yorkais du moins !
MNDFL est un autre lieu dédié à la méditation, comme une salle de gym ou un studio de yoga. On y prend sa place en ligne en choisissant même précisément son coussin puisqu’ils sont numérotés !
C’est une entreprise moderne, orienté efficacité, rapidité et service, bien étudié et marketé. Les clients ont ce pour quoi ils payent, pour le prix qu’ils payent + une tasse de thé sponsorisée par une marque tendance avec un nom à la mode !
J’avais lu un article sur cet endroit dans Mindful Magazine et j’avais très envie de tenter l’expérience. La veille, j’ai acheté en ligne une session de 30 minutes et choisi un coussin (numéro 7, un numéro que j’aime bien et tout près de l’instructeur), j’avais payé $10, le tarif « spécial nouveaux venus ».
Le studio est facile d’accès depuis la rue, à un niveau légèrement plus bas. « MNDFL » est écrit sur une grande baie vitrée qui donne sur la 8éme rue et son animation. En descendant les quelques marches, on pénètre dans un espace calme et bien décoré où l’on peut laisser ses chaussures près de bancs en bois, au milieu d’une foule de boots en peau de mouton !
Puis en donnant mon nom au gentleman derrière le comptoir, je reçois les indications suivantes : « prendre une tasse de ce fameux thé et m’asseoir dans l’espace d’attente » où se trouvaient déjà plusieurs jeunes femmes.
Ainsi que quelques hommes d’âges variés.
Personne n’avait de téléphone dans les mains, le gentleman ayant proposé de le garder pour nous ou de le laisser dans notre sac près de son comptoir.
Cela créait un contraste important par rapport aux attitudes speedées dans la rue. Personne de se parlait non plus.
J’ai eu le sentiment que les personnes ne savaient pas quoi faire en attendant ou même était un peu gênés de n’avoir rien à faire, à part boire leur tasse de thé.
Je sais comment l’on se sent dans ce cas, cela m’a pris du temps de me débarrasser de cette habitude fortement ancrée de me distraire avec mon téléphone à chaque fois que je dois attendre quelque part, ou manger, ou m’asseoir dans un transport en commun.
Et quand on a grandi avec ça, c’est encore plus difficile !
Ce fut le temps de la pratique, une session spécifiquement sur le rapport aux émotions. Nous sommes entrés dans une belle pièce claire, aux sols recouverts de parquet en bois et aux murs en briques pour certains, le tout peint d’une sobre nuance de gris léger (une seule …). Un autre mur décoré par un beau jardin vertical que j’ai reconnu, l’ayant vu dans l’article de Mindful Magazine.
Les coussins furent rapidement occupés et une trentaine d’individus rassemblés dans cet espace retiré de l’agitation de la ville. Pourtant, si profondément au cœur de celle-ci.
Je dois avouer que la partie de mon mental qui juge (plus ou moins développée selon les situations !) était bien occupée en chemin pour le coussin numéro 7… J’observais mes propres évaluations et comparaisons. Je percevais mes aprioris, mes préjugés : « c’est superficiel, un truc bien commercial, bla, bla, bla… ».
Je m’étais faite une idée bien sûr, comme pour ma visite à Mindful Harlem certainement, mais, là-bas j’avais un apriori positif !
Donc j’essayais de ne pas trop partir dans ces considérations envahissantes pour rester dans l’expérience telle qu’elle est, sans me laisser influencer par ce « gossip » mental.
L’instructrice, une jeune femme, s’assit, se présentant comme s’étant formée auprès de différentes traditions et institutions. Mon mental jugeant et comparateur à son activité était au maximum de mon côté !
Elle commença à guider ce qui fut une session qui me toucha profondément, elle m’aida à faire face et à accueillir mon état émotionnel à ce moment là et les pensées qui l’accompagnaient.
J’étais moins « super cool de partir seule 15 jours aux USA » que je me le racontais. J’ai pu percevoir plus de nuances dans mes émotions face à ce voyage, ainsi que d’autres aspects de la réalité de mon être changeant et sensible.
Une guidance simple, précise, bien déroulée et très applicable.
Le tout en 30 minutes, ce qui vraiment court pour explorer ces aspects et pour accompagner l’autre à expérimenter ce face à face avec lui-même, comme ce fut le cas pour moi. Je voulais applaudir quand elle a sonné le cloche !
Puis elle a proposé aux participants de partager leur expérience et poser des questions si ils le souhaitaient. Et là aussi, j’ai été impressionnée d’observer comment elle a géré ces échanges, appelé « dialogue exploratoire ». Cela requiert d’être à la fois dans une écoute profonde de l’autre sans donner de conseils, mais en accueillant ce que l’autre exprime et en faisant des retours utiles éventuellement.
Le partage de ces personnes fut touchant, sincère et direct : la peur, le doute, les joies, les espoirs… parlaient de notre humanité commune face à notre vulnérabilité.
Ce qui ce passait là était profond et réel, pas de superficialité ici. Bravo MNDFL !
Il y eu quelques discussions entre des participants après la session, et puis chacun pris son sac et son téléphone, sauta dans ses boots en peau de mouton (comment retrouver les siennes dans le lot !) et en route pour la suite de sa journée new-yorkaise. C’était certainement un peu plus léger et fort, et peut être avec en soi un meilleur sens de comment vivre avec tout cela.
Ce fut le cas pour moi et cette journée d’exploration de Mindful Manhattan m’a permis de toucher du doigt un aspect de la ville, invisible jusque là.
Différents endroits, différentes personnes … même besoin de paix, uptown et downtown et partout autour du globe.
Emmanuelle Roques
Instructrice de méditation de pleine conscience, cofondatrice du projet Mindfulness Social Club
Novembre 2017
Informations supplémentaires
Ci après, des ressources sur des lieux, événements et plus :
A Manhattan :
Site des instructeurs MBSR locaux : plusieurs sessions par semaines http://www.mindfulnessmeditationnyc.com/
Centres bouddhistes :
Shambhala Meditation Center
New York Insight
Groupes de pratique Thich Nhat Hanh: 3 à Manhattan & 2 à Brooklyn
Pratiques Zazen :
Still Mind Zendo
New York Zen Center for Contemplative Care
Près de New York :
Eileen Fisher LifeWork in Irvington, NY
Garrison Institute, NY
Omega Institute, Rhinebeck NY
Monastére Thich Nhat Hanh Blue Cli , Pine Bush, NY
Un peu plus loin de New York :
Center for Mindfulness à Boston, MA
Insight Meditation Society à Barre, MA (centre de retraites)
Autres ressources :
Sharon Salzberg, l’une des pionnières, cofondatrice de l’Insight Meditation Society et enseignante de pratique de compassion, très active à New York et ailleurs. Voici son agenda avec des ateliers, stages et conférences, et des méditations en ligne, notamment sa série loving kindness très inspirante et filmée à NYC.
Wisdom 2.0, LA conference sur la Mindfulness dans la societé (à NYC & à SF)
Mind & Life Institute, conférences sur les dernières recherches en sciences
contemplatives et neurosciences.
Mindful Magazine seul magazine entièrement dédié à la Mindfulness.
L’application Headspace pour continuer à pratiquer la méditation, l’anglais aussi !
Commentaires et questions sur
Une expérience sur la pratique de la méditation à New York
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